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Le problème des enfants placés au long cours


  • Depuis les années, 2000 de nombreux spécialistes de domaines différents ont essayé d'alerter nos députés et nos sénateurs pour que les lois qui régissent la protection de notre jeunesse soient modifiées de telle sorte que cette protection devienne une réalité et ne reste plus le cache-misère actuel abandonné par la décentralisation hâtive de 1982 à nos conseils généraux.

  • Si notre système de protection de l'enfance s'avère très efficace à court terme c'est-à-dire pour des placements de moins de quelques mois, les problèmes posés par l'accueil à long terme, qui couvrent généralement plusieurs années, débordent largement de la simple aide sociale. Les bilans chiffrés de cette activité qui réussissent à parvenir de différents analystes indépendants sont tous négatifs et alarmants ... D'autres bilans excluent purement et simplement, les enfants ayant des troubles de la conduite ce qui biaise complétement les résultats ...
    Ce qui est désastreux, c'est la rareté de la prise en compte du drame psychologique qui s'élabore, devant les yeux des magistrats et de l'Aide Sociale à l'Enfance, au nom du Droit des parents. Certains enfants qui parfois non seulement ont souffert dans leur corps souffrent encore plus gravement dans leur développement psychique du fait de la poursuite répétitive des contacts avec leur parents biologiques. Ces contacts prennent en effet une valeur traumatique au sens psychologique du terme. Les enfants vivent dans une obligation judiciarement prescrite de liens relationnels avec leur parents alors que ceux-ci sont manifestement insuffisants et toujours en pointillés imprévisibles. Il en résulte un déficit majeur de confiance en l'autre puis en soi-même qui évolue encore trop souvent vers un déficit cognitif massif, une débilisation induite par les conditions imposées à l'enfant. Dans cette obstination répétée à conserver les liens de sang, malgré une souffrance délétère, et, sans répondre à la nécessité d'une autre autorité familiale humainement incarnée, la Justice française des enfants est encore trop souvent sourde et aveugle à la dimension psychique de ces naufrages. Nous savons pourtant et cela depuis 1940 que les meilleures institutions pour l'enfant sont non seulement impuissantes à faciliter harmonieusement le psychisme des enfants mais qu'elles le détruisent par le biais de ce qu'on a appelé "l'hospitalisme" à cause principalement de la succession permanente des responsables de l'enfant. Cela se vérifie dans les foyers, mais malheureusement aussi dans les familles d'accueil où l'on peut constater chez les plus fragilisés une évolution descendante progressive de leurs capacités intellectuelles . Qu'importe apparemment ces capitales découvertes puisque c'est exactement la succession que va vivre l'enfant dit en "protection infantile" avec les référents sociaux et judiciaires qu'il rencontrera tout au long de sa dite protection aliénante.




  • Au niveau médical tout d'abord, plusieurs livres du Professeur Maurice Berger (« L'échec de la protection de l'enfance »; « Ces enfants qu'on sacrifie au nom de la protection ... » ) pointent les graves répercussions secondaires aux placements en termes de troubles psychiatriques. D'une part, de graves répercussions sur les capacités intellectuelles : incapacités à apprendre, à penser, dysharmonies cognitives, constitution d'une mémoire traumatique voire développement de déficiences intellectuelles. Deuxièmement, de graves troubles relationnels, au minimum une grande difficultés à lier amitié avec des camarades au pire des troubles graves du contact. Enfin, des troubles du comportement, le plus souvent avec violence. Ces pathologies deviennent vite irréversibles avec la prolongation des placements. Cette irréversibilité se produit parfois malgré les différentes aides spécialisées. Les aides qu'ils nécessitent doivent rapidement devenir multiples : médicales d'abord, ambulatoires en CMP mais parfois aussi hospitalières; et également éducatives dans des centres ou instituts médico-éducatifs, parfois en Belgique, lorsque l'école classique française est devenue impossible, mais aussi aides plus complexes sociales , ou/et, judiciaires.

  • Au niveau judiciaire, une récente étude de Michel Giraud portant sur l'action éducative judiciaire pour le compte de la mission de recherche Droit et Justice au tribunal pour enfants de Lyon corrobore pleinement le point de vue de Winnicott : "La santé psychique c'est de vivre à distance des personnes qui nous causent du tort fussent-elles nos parents". Seuls les enfants qui souhaitent être séparés de leur famille et dont leur souhait est suivi par le juge ont une évolution satisfaisante, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas de difficultés comportementales ou relationnelles. Bien qu'ils obtiennent satisfaction pendant la durée de leur protection sur laquelle porte l'étude de Michel Giraud, leur devenir, une fois passée l'âge de 21 ans reste critique et est lié à la possibilité éventuelle d'adoption par la famille qui les a accueillis sinon ils se retrouvent souvent à la rue. "Primum non nocere deinde curare - D'abord ne pas nuire mais soigner" aurait dit Hippocrate




  • Au niveau du vécu, vous pouvez lire le livre autobiographique 2007 de Gérard Lenorman "Je suis né à 20 ans" qui illustre l'incompréhensibilité de l'absence d'amour d'une mère pour un enfant. "Si j'ai pu survivre dans ce chaos, c'est grâce à une sagesse innée : subir sans subir, souffrir sans souffrir, être indifférent sans l'être ..."

  • Au niveau social, enfin, l'étude de Jean-Marie Firdion « Influence des événements de jeunesse et héritage social au sein de la population des utilisateurs des services d'aide aux sans-domicile » retrouve , entre autres, une proportion de plus de 25% d'antécédents de placements chez les SDF.

  • La loi récente du 5 mars 2007 qui a modifié 5 de nos codes législatifs n'a malheureusement rien changé à la prééminence du droit parental sur le droit du mineur. Jusqu'à quand notre législateur restera-t-il sourd aux souffrances induites et entretenues chez l'enfant par nos lois dans le cadre dit de la protection. Reverra-t-il enfin sa copie ? Enfin, la loi du 1er mars 2016 a voulu remettre au centre l'intérêt de l'enfant mais sans préciser qui dicterait cet intéret. Elle a aussi créé une infraction de non-dénonciation d'agression sexuelle sur mineur et a rendu possible l'application de circonstances aggravantes à l'environnement donné à l'enfant.

  • Comment n'est-il pas encore légal pour une assistante maternelle («assistante familiale ») de protéger un enfant contre un parent réclamant l'application stricte de son droit de garde?

  • Pour notre modeste part, et, en tant que prestataires de soins sur le secteur 59i06 et dans le cadre limité des accueils familiaux thérapeutiques, nous sommes très vigilents lorsque dans la prise en charge d'un enfant la durée d'accueil dépasse six mois.




  • Une première remarque serait d'admettre que notre méthode de protection des enfants dans les placements au long cours est particulièrement inefficace (moins d'un enfant sur dix s'en sort bien psychiquement voire pénalement) et très coûteuse sur plusieurs plans. Il s'agit de la part la plus importante des budgets sociaux de nos conseils généraux. Une seconde réflexion permettrait de remarquer que ce qui est demandé aux Assistantes familiales dans ce cas très particulier des placements au long cours est de l'ordre de l'impossible et du contradictoire, et, ceci de l'aveu même d'assistantes familiales chevronnées. D'abord, protéger l'enfant sans avoir sur lui une quelconque autorité légitime personnelle est quasi-impossible. Il faut pourtant agir pour le protèger parfois contre lui-même, parfois contre ses ascendants. Enfin, aimer un enfant avec lequel on vit non pas gratuitement mais dans le cadre d'un travail au long cours, l'aimer sans excès pour ne pas gêner les parents biologiques devrait avoir été dénoncé comme particulièrement distordu alors que le développement harmonieux nécessite de la gratuité, de l'oblativité, et de la responsabilité. La responsabilisation légale des adultes par rapport à un enfant placé est de plus trop éparpillée et diluée auprès de plusieurs référents sociaux du conseil général et parfois complété par un ou plusieurs magistrats (JDE et/ou JAF) qui se succèdent en long chapelet. Une véritable "usine à gaz". De plus, la survenue de la retraite de l'assistante familiale ou des vingt ans du jeune sonne la fin de cette mesure d'aide. Cela nuit gravement à la concordance des réponses apportées et surtout au développement de la personnalité de ces enfants et en particulier au niveau du narcissisme et de la confiance qu'ils ont en autrui. Cela réalise une porte royale vers la psychose narcissique et le terrorisme. A quand le scandale politique des enfants placés au long cours ?




  • Une troisième réflexion eu égard au passage actuellement obligatoire vers la déchéance parentale pour être réellement protégé de parents toxiques est proprement ubuesque. Comment l'enfant peut-il survivre psychiquement à une telle déchéance dont il est issu? Ne peut-on pas envisager pour protéger ces enfants là, une forme d'adoption simple qui ne nécessiterait pas de déchéance et qui ne détruirait pas la filiation tout en compensant l'insuffisance d'autorité et de parentalité dans l'intérêt de l'enfant ? La préservation préférentielle de la parentalité biologique ou loi du sang apparaît constituer l'erreur fondamentale des lois sur la protection infantile. Il faut abroger les lois sur la déchéance de l'autorité parentale : "Il ne peut en aucun cas être prononcé une quelconque déchéance de l'autorité parentale, mais une adoption simple vicariante est possible. Dans le cas où la santé, la moralité, l'éducation, ... restent durablement compromise au terme d'une période de six mois d'assistance socio-familiale et médicale, une invalidation de l'autorité parentale peut-être prononcée. Cette invalidation de l'autorité parentale ne peut être prononcée que conjointement couplée avec une adoption simple vicariante qui consiste en la nomination d'un père et d'une mère vicariants. L'adoption simple vicariante préserve l'état civil d'origine à l'exception de l'ajout du nom du couple parental vicariant et de l'utilisation d'un trait d'union entre le nom vicariant et celui d'origine. Dans le cas où l'enfant à plus de onze ans, son avis serait requis."

  • Ces premières remarques faites, il resterait à construire cette entreprise en évitant tout angélisme. En effet, trois métiers étaient, selon Freud lui-même, et restent presque impossibles : celui d'enseignant, celui de psy, et, celui de parent. Il est donc indispensable d'aider réellement tout parent adoptant. Pour soutenir le parent ou le couple parental vicariant il faut lui donner l'enseignement, l'accompagnement, et l'aide technique dont bénéficient actuellement les assistantes familiales (autrefois assistantes maternelles). L'association de la responsabilisation civile humainement incarnée et de la formation et du soutien à l'adoption constituent les conditions minimales pour assurer le succès de réelles protections des enfants et éviter le piège des institutions (socio-administrativo-judiciaires) faussement responsables et plaidant toujours ... non coupables ! .

  • Depuis le "Children Act" de 1989, en Angleterre la loi est trop stricte. Il a été décidé de retirer sur simple présomption de mauvais traitement ou de futures maltraitances l'ensemble des enfants de leur famille biologique... Curieusement, c'est souvent le cas de familles d'origines étrangères (car le pervers c'est toujours l'autre, pas nous-mème) dont certaines françaises vivant en Angleterre. Par ailleurs, après que l'instruction ait démontré l'absence de preuve objective, il n'y a pas de retour systématique dans les familles d'origine, ce qui est incompréhensible! Cela est insupportable et cette loi anglaise ne va pas du tout dans le sens de l'intérêt de l'enfant.




  • En 2016, en raison de difficultés financières, le conseil général du département du Nord a décidé de diviser par deux le nombre des enfants accueillis sans distinction de la durée prévisible de cet accueil. Espérons que cette difficulté structurelle puisse apporter un bénéfice à la situation de ces enfants "de la Casse [lapsus pour la DASS]" (comme dans le film le Papillon avec Michel Serrault).




  • Le 14 mars 2016, le législateur reformule le fond de la loi et se base désormais et c'est heureux sur les besoins fondamentaux et l'intérêt de l'enfant dans ses relations personnelles avec ses ascendants. "La protection de l'enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l'enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits. Reste à en observer et en apprécier les applications et les déclinaisons qui seront faites de cette très honorable loi ... Que fera-t-on par exemple si malgré le retrait, et tous les aménagements et aides possibles l'enfant protégé continue à se dégrader ? ...




  • Le 4 Juillet 2019, ENFIN, jour centenaire de l'anniversaire de la création du Comité international des droits de l'enfant, le législateur, en admettant le caractère civil et de portée générale de la protection de l'enfant et en plaçant la France au 55ième rang des états au monde, décide de l'interdiction des chàtiments corporels et de la violence éducative dite "ordinaire" pour l'enfant ...


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